Arrêtez de « scroller », choisissez votre avenir !

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Nouvelle-Calédonie et Europe, quels liens ?

Dans un peu plus d’une semaine, le dimanche 26 mai, la Nouvelle-Calédonie est appelée à participer au scrutin certainement le plus lointain : les élections européennes. Le drapeau étoilé flotte néanmoins ici, et le pays est déjà éligible de manière favorable à l’aide de l’Europe.

La mise sous pli de la propagande électorale en vue des élections européennes du 26 mai prochain a débuté hier pour trois jours à Nouméa. Photo Thierry Perron

Statut

La Nouvelle-Calédonie figure, depuis le Traité de Rome en 1957, dans la liste des Pays et Territoires d’Outre-Mer, ou PTOM, aujourd’hui au nombre de 25. Ces espaces sont liés à un État membre de l’Union européenne – en l’occurrence, ici, la France -, jouissent d’un statut spécial d’« associé », mais ce régime spécifique les exclut des règles européennes communes aux 28 Etats au drapeau étoilé en matière de commerce, de concurrence, d’environnement, de fiscalité, etc.

« Les territoires d’outre-mer ne doivent pas être vus comme un fardeau pour l’Europe » Maurice Ponga, député européen sortant.

Pour autant, cette association permet aux PTOM de bénéficier des attributs de la citoyenneté européenne – à l’exception des terres britanniques – . D’où l’invitation à voter, dans un peu plus d’une semaine, le dimanche 26 mai, aux élections européennes, en Nouvelle-Calédonie. Bien évidemment, le parlementaire européen ultramarin défend les intérêts non seulement de ses électeurs mais aussi, et surtout, des citoyens de l’UE, au sens large.

Avantage

La position de PTOM rend applicable, sur le Caillou notamment, les politiques de coopération régalienne, dans le domaine militaire, ou encore, sur le plan de l’entraide judiciaire entre la France et l’Union européenne. En outre, les Calédoniens sont des citoyens européens, et peuvent, à ce titre, se déplacer en Europe, étudier, travailler, créer des entreprises, commercer… Autre avantage, les produits locaux destinés à la vente au sein de l’Union calédonienne ne sont pas frappés de droits à l’importation. 

Aides

Un bénéfice de ce régime d’association : des aides, ou plutôt, l’accès à deux familles de dispositifs. La première, le Fonds européen de développement ou FED. L’enveloppe territoriale du 11e FED, sur la période 2014-2020, pour la Nouvelle-Calédonie, s’élève à 29,8 millions d’euros, soit 3,6 milliards de francs. Le secteur est fléché : « emploi et insertion professionnelle ». Une enveloppe régionale, chiffrée à 36 millions d’euros ou 4,3 milliards de francs, est de plus partagée entre les quatre PTOM de l’océan : Polynésie française, Wallis-et-Futuna, Pitcairn et Nouvelle-Calédonie. Ce budget vient soutenir des projets de coopération entre ces PTOM du Pacifique dans les chapitres de l’adaptation aux changements climatiques, ainsi que de la gestion durable des ressources naturelles. L’Union européenne met des moyens, y compris humains, pour aider à élaborer des opérations.

Les pays de l’UE, ainsi que les PTOM, peuvent accéder à des « programmes horizontaux », la seconde famille de financements. Dans la liste, Erasmus pour la mobilité des étudiants et des professionnels. Formule plus adaptée et économique, un Erasmus régional, tourné vers des universités ou des structures de formation du Pacifique, est en réflexion. Sont aussi cités le programme « Horizon Europe », doté de 100 milliards d’euros à l’échelle européenne sur la période 2021-2027, et axé sur le soutien à la recherche, ainsi que « Life » avec 3 milliards d’euros sur 2014-2020 pour des projets d’investissement en faveur de l’environnement. Le positionnement de la Nouvelle-Calédonie sur ces dispositifs n’est toutefois pas aisé. Du tout. Contrairement à l’initiative hors cadre « Best » dédiée aux outre-mer, à leurs biodiversité et à leurs écosystèmes.

Indépendance

Une question : l’accession du pays à l’indépendance couperait-elle le lien avec l’Europe et ses financements ? La réponse est relativement simple : tout dépend de la solution institutionnelle envisagée. 

Si la pleine souveraineté est prononcée, si la Calédonie acquiert la personnalité juridique internationale propre, et que ce choix la dissocie de l’Etat membre de l’UE, en clair de la France, alors le Caillou perd de droit son statut de PTOM. Et de fait, les aides inhérentes. La nouvelle nation aurait ensuite la possibilité d’intégrer la catégorie des pays d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique ou ACP, sous réserve que son niveau de développement économique ne soit pas supérieur aux critères définis, un vrai point d’étude. L’Union européenne finance des programmes en faveur du développement des pays ACP par l’intermédiaire du Fonds européen de développement ou FED.

Second cas, si une Nouvelle-Calédonie indépendante signe un régime d’association quel qu’il soit avec la France, le statut de PTOM peut être maintenu à condition que les 28 Etats de l’UE valident l’option.

Brexit

Une répercussion du Brexit, sujet majeur des élections européennes : la zone Pacifique perdrait un PTOM, Pitcairn, territoire britannique. En toute logique, l’enveloppe régionale du 12e FED serait moins importante. Autre conséquence, avec la sortie du Royaume-Uni, troisième contributeur à ce Fonds, la somme globale dédiée diminuerait, à moins que les Britanniques décident de continuer à participer même hors UE. Et puis l’entrée de produits calédoniens sur le marché de la Grande-Bretagne serait un peu plus compliquée. Un risque réel.


34 listes engagées : un casse-tête sans nom dans le pays

Les maires calédoniens se sont interrogés sur le nombre de panneaux à installer. Leurs réponses sont diverses. Photo Thierry Perron

«Ridicule et grotesque ». L’ancien président de la République Valéry Giscard d’Estaing n’a pas pris de gants pour juger la présence de 34 listes aux élections européennes. L’organisation du scrutin, voué à établir un nouveau Parlement, se fait Etat membre par Etat membre. En clair, chaque pays a la responsabilité de bâtir cet événement électoral selon son propre cadrage. Ce suffrage national vise à nommer des représentants du pays au sein de l’organe parlementaire de l’Europe. Le gouvernement français actuel a décidé de supprimer la division des circonscriptions pour n’en créer qu’une seule. Avec 34 listes au compteur, l’affaire, sur un plan pratique, n’est pas simple, du tout, en Nouvelle-Calédonie, comme dans d’autres territoires.

Le taux de participation au précédent scrutin européen en 2014 avait atteint ici 27,05 %, contre 21,82 % en 2009. Pas sûr que le record soit battu le dimanche 26 mai au soir, surtout après le référendum de novembre dernier puis les provinciales il y a quelques jours où l’attention de l’électeur calédonien a été modérément à fortement sollicitée.

Bulletin à imprimer

Pour participer, avant d’être motivé, il faut d’abord être renseigné. Une part très réduite des listes en course dispose d’un représentant en Calédonie. Et bien peu ont fait campagne. « C’est bien joli de mettre des panneaux, mais il faut aussi que quelqu’un colle les affiches ! Tous les partis vont-ils envoyer les documents ? » remarquait mercredi le maire de Hienghène, André Lévy. « Il y a vingt tribus chez nous. Donc, normalement, ce sont 34 ou 35 panneaux fois 20, vous imaginez ! » Cette formule aurait un coût certain. L’information sera-t-elle dès lors concentrée au village ? La commune de Farino a opté pour cette stratégie : « Nous avons mis 36 emplacements devant la mairie. Un seul lieu d’affichage », explique le premier édile, Régis Roustan.

 C’est bien joli de mettre des panneaux, maisi l faut aussi que quelqu’un colle les affiches. »

Hier après-midi, deux affiches seulement avaient été collées par des militants : celles des listes de La République en marche et du Parti communiste.

A Nouméa, au regard de l’étendue de la ville, les sites d’affichage sont plus nombreux, mais avec uniquement douze panneaux chacun, comme un rappel visuel des provinciales. 

D’après les autorités, sur les 34 listes, quatorze ont envoyé du matériel électoral en Nouvelle-Calédonie. Ce qui signifie que le dimanche 26 mai, quatorze tas de bulletins seront à disposition sur la table dans les bureaux de vote du pays. Le champ des possibles n’est pas réduit pour autant, l’électeur peut imprimer son bulletin de vote à partir du site web officiel de la liste sélectionnée, en respectant – nuance importante – la couleur déterminée et la taille du papier.

Reste le fond du discours. Vu les enjeux très intra-métropolitains abordés lors des débats, « la population calédonienne peut-elle faire la différence entre les verts, les populistes, les socialistes, etc ? Pas sûr » s’inquiète un militant. Les documents de campagne bientôt reçus sous enveloppe dans les maisons ne permettront ici qu’une analyse partielle : à l’initiative des listes, seules douze professions de foi seront diffusées. 

Un nombre record

Seule la moitié du nombre record de 34 listes, publiées pour les élections européennes du 26 mai en France, émane des partis traditionnels. 

Lutte Ouvrière (LO), Nathalie Arthaud ; 

Parti communiste (PCF), Ian Brossat ; 

La France Insoumise (LFI), Manon Aubry ;

 Générations (DVG), Benoît Hamon ;

Place publique/PS/Nouvelle donne (PS/PP/ND), Raphaël Glucksmann ;

Europe Ecologie Les Verts (EELV), Yannick Jadot ;

La République en Marche/MoDem (LREM/MoDem), Nathalie Loiseau ;

Les Européens – UDI (UDI), Jean-Christophe Lagarde ;

Les Républicains (LR), François-Xavier Bellamy ;

Debout la France (DLF), Nicolas Dupont-Aignan ;

Rassemblement national (RN), Jordan Bardella ;

Les Patriotes (DVD), Florian Philippot ;

Union Populaire Républicaine (DVD), François Asselineau ;

Evolution citoyenne (DIV), Christophe Chalençon ;

 « Alliance jaune » (DIV), Francis Lalanne ;

Mouvement pour l’initiative citoyenne (DIV), Gilles Helgen ;

Urgence Ecologie (ECOL), Dominique Bourg ;

Une France royale au coeur de l’Europe (DIV), Robert De Prevoisin ;

La ligne claire (DIV), Renaud Camus ;

Parti pirate (DIV), Florie Marie ; Démocratie représentative (DIV), Hamada Traoré ; Parti des citoyens européens (DIV), Audric Alexandre ;

Liste de la reconquête (DIV), Vincent Vauclin ;

Parti fédéraliste européen (DIV), Yves Gernigon ;

Allons enfants (DIV), Sophie Caillaud ;

Décroissance 2019 (DIV), Thérèse Delfel ;

À voix égales (DIV), Nathalie Tomasini ;

Neutre et actif (DIV), Cathy Corbet ;

Parti révolutionnaire communiste (DIV), Antonio Sanchez ;

Espéranto (DIV), Pierre Dieumegard ;

Parti animaliste (DIV), Hélène Thouy ;

Les oubliés de l’Europe (DIV), Olivier Bidou ;

Union démocratique pour la liberté, égalité, fraternité (UDLEF), Christian Luc Person ;

Une Europe au service des peuples, Nagib Azergui.


210 846

électeurs sont inscrits sur la liste générale pour ces élections européennes du 26 mai en Calédonie. Auxquels s’ajoutent 81 ressortissants européens.


20

En 1999, dernier scrutin comparable avec une circonscription unique, 20 listes de 87 candidats avaient été déposées.